Un regard sur notre évolution

Certain(e)s d'entre vous l'ont peut-être remarqué, mais canalblog a récemment subi de gros changements qui ont également impacté le format de mes écrits ces derniers jours. Il a donc fallu que je reformate la majorité de mes textes. Au début, ça m'a surtout saoulée, j'avoue. Mais en travaillant sur mes anciens textes, je me suis rendu compte à quel point ma mentalité avait changé ces trois dernières années. Je me suis surprise à grimacer en lisant certaines des phrases que j'employais il y a à peine deux ans.

J'aime bien faire des rétrospectives de mon année sur ce blog, mais ici je vais faire quelque chose de plus large. Un vrai retour/regard sur l'évolution de notre relation avec Maître depuis le début de ce blog. Beaucoup de choses ont évolué dans notre mentalité en si peu d'années.

Déjà, en relisant mes premiers textes et notamment celui sur notre relation M/e, je remarque que je disais déjà vivre une relation dans laquelle la domination passait principalement par le SM. Je prétendais déjà ne plus être dans un schéma orienté abnégation et service, et que l'appartenance était un modèle relationnel que je désirais par intérêt personnel.

Pourtant, je trouve que ça ne se ressent pas forcément dans les articles qui suivent. Malgré toute notre volonté de nous éloigner de cette vision de la relation M/e et TPE, je continuais à écrire des textes à base de "merci Maître, je ressens beaucoup de gratitude", je parlais encore d'humilité et nous avons tous les deux bien insisté sur cette "soumission inspirée Japon" que nous avons (bien heureusement) fini par laisser tomber.

Pendant longtemps, notre M/e était en fait le résultat d'un mauvais croisement entre une M/e Delambresque à la française et une relation Master/slave protocolaire à l'américaine (coucou Robert Rubel et LT Morrison !).

Lorsque je relis mes textes, je me rends compte que la prise de conscience n'a véritablement commencé qu'à partir d'environ novembre 2022 (soit deux ans après le début officiel de notre cheminement vers le TPE). Nous avons passé deux ans à explorer, échouer, nous relever, insister sur des choses qui ne nous convenaient pas, échouer à nouveau et se relever.

Les discussions avec des ami(e)s, les conférences de Sir Luke et victor ou celles de vahavta, le lâcher prise sur nos idées pré-conçues (et plus persistantes que l'on aurait cru) sur les relations M/e ont contribué à ce que nous débutions enfin un cycle qui nous ressemble véritablement. Il a notamment coïncidé avec mon passage d'esclave à propriété humaine. Il a coïncidé aussi avec l'exploration plus poussée du CNC, du sadomasochisme émotionnel et des dynamiques dark dans notre relation.

D'autres causes de cette prise de conscience sont moins évidentes. Bien que j'aie fait mon coming-out non-binaire il y a plus de deux ans maintenant, j'ai mis un certain temps à véritablement explorer et me trouver dans ma transidentité. C'est quelque chose qui a beaucoup contribué à la déconstruction du schéma hétéronormé dans lequel nous étions avec Maître au début de notre relation. J'ai notamment arrêté de chercher à être féminine pour plaire et pour ressembler à d'autres soumises. En prenant comme modèles mes adelphes queer, je me suis rendu compte à quel point le schéma classiques des relations TPE hétéronormées ne m'a jamais vraiment convenu.

Par ailleurs, une chose qu'on remarque assez rapidement lorsqu'on commence à lâcher prise et faire véritablement ce qui nous plaît dans le BDSM, c'est qu'on finit par revenir aux racines d'une manière ou d'une autre. Au début de ma relation avec Maître (avant même que nous soyons en D/s 24/7), je me considérais brat. Ce n'étais pas forcément pour les bonnes raisons et je ne savais clairement pas comment m'y prendre, mais ça faisait quand même partie de moi. En tout cas, il y avait aussi un aspect joueur, une légèreté et une joie de vivre dans notre relation, que nous avons perdus en essayant de nous conformer au schéma sérieux et solennel des relations M/e traditionnelles.

Pourtant, malgré toutes les disputes, les difficultés et les blocages, nous n'avons pas perdu espoir et nous avons continué à nous chercher ensemble. Peu à peu, les choses sont devenues plus claires. Plus nous devenons nous-mêmes, plus nous revenons aussi à cette légèreté. Nous apprenons à nouveau à nous amuser dans le BDSM plutôt que de se mettre la pression pour se conformer à un schéma qui ne nous a jamais convenu. J'ai recommencé à devenir taquine avec Maître, dans la vie comme en séances (alors que pendant une longue période, je pensais qu'il fallait juste la boucler et encaisser).

Les protocoles sont de plus en plus une histoire ancienne. Au-delà de quelques règles, habitudes et services comme les demandes de permission, le vouvoiement, etc. notre relation est plus ou moins uniquement définie par le SM, la discipline et le contrôle absolu et permanent de Maître sur moi. Et je me sens tellement plus authentique maintenant.

Pour la première fois depuis longtemps, j'ai recommencé à regarder quelques vidéos 101 d'Evie Lupine. Le poids que cette prise de conscience a libéré nous a permis d'avoir l'énergie mentale pour explorer d'autres horizons BDSM qui nous attirent. Nous avions tenté le age play à une époque, résultat : ce n'est pas pour nous. En revanche, le pet play (et plus particulièrement dark puppy play) nous attire de plus en plus. Dans cette pratique, nous aimons les aspects d'entraînement, obéissance et déshumanisation dénués du protocole ultra formel que l'on retrouve dans d'autres types de pratiques BDSM. Ce n'est pas fait pour remplacer notre dynamique principale Propriétaire à propriété humaine (d'ailleurs ce n'est pas mutuellement exclusif), mais uniquement y ajouter une saveur particulière de temps en temps. Et d'après le public que cette pratique semble attirer sur Fetlife, je dirais que la transmasculinité et la neuroatypie y sont peut-être pour quelque chose aussi ! J'en parlerai dans mon prochain article.

En tout cas, je n'ai plus honte de ne pas ressembler à une esclave romaine en soirée. Je n'ai pas besoin de lui parler avec une voix mielleuse et de garder tout le temps la tête baissée pour lui appartenir. Cette soumission là, je lui dis adieu. Ni kajira de Gor, ni esclave à la Histoire d'O, ni slave à l'américaine. Juste une propriété masochiste et taquine dans une relation TPE fortement CNC.

D'ailleurs, ça va peut-être sembler étonnant à certain(e)s d'entre vous, mais si je parle aussi moins de mon quotidien sur ce blog, c'est parce que je ressens moins le besoin de prouver qu'il est légitime. Avant, je cherchais toujours à ce que trois cent mille choses incroyables nous arrivent tous les jours du point de vue BDSM et à les montrer, maintenant... plus vraiment. Je parle de mon quotidien lorsque j'ai quelque chose que j'estime intéressant ou éprouvant à raconter. Mais je n'ai plus ce besoin de justifier constamment que je suis bien dans une relation M/e avec une dose satisfaisante de SM et de hiérarchie.

Maintenant, il me semble évident que toutes les difficultés que nous avons vécues ne viennent pas de nulle part. C'est un peu une conséquence inévitable lorsqu'on commence à fréquenter la communauté BDSM, qu'on se compare et qu'on s'inspire. Ce n'est pas une mauvaise chose en soi, ça permet d'évoluer et de découvrir de nouvelles personnes et de nouvelles manières de vivre. Si je n'avais pas fait partie de cette communauté, je n'aurais peut-être jamais découvert le concept de dark dynamic. Mais quoiqu'il en soit, vient un moment où il faut prendre conscience que ce qui nous convient vraiment, nous sommes les seuls à le pouvoir le trouver. Personne d'autre ne peut faire le boulot à notre place.

D'ailleurs, Maître et moi prévoyons de refaire bientôt un point sur notre relation en se basant sur cette vidéo d'Evie Lupine que j'ai trouvée très utile ! Je vous la conseille particulièrement si vous avez l'impression que vos ambitions relationnelles sont brouillées.

PS : quand je parle de légèreté et ne pas forcément se prendre toujours au sérieux dans une relation TPE, ça ne sous-entend aucunement qu'il faut négliger des aspects comme la sécurité physique et émotionnelle, la mitigation des risques, etc. Il faut toujours être sérieux lorsqu'il s'agit de ces notions. Mais c'est pour dire, même le edge play n'a pas besoin d'être toujours hyper formel !